dimanche 28 juin 2015

Les ATP au Fort Saint-Jean du MUCEM : une arlésienne ?

Hayek über alles (paroles d'un partisan acharné de la libéralisation à outrance du secteur professionnel des taxis).

Je refuse de jouer sur d'autres pianos que ceux de Tartinovitch. (Hommage personnel au comédien Jean Temerson (1898-1956) qui interpréta le rôle de Tartinovitch dans le film Les Cinq sous de Lavarède en 1938)

Qui ne connaît le MUCEM de Marseille, ce fantastique musée hétéroclite et éclectique inauguré en grande pompe à l'occasion de "Marseille-Provence 2013 capitale européenne de la culture ?"

L'oeuvre architecturale est une réussite magistrale de Monsieur Rudy Ricciotti dont les affinités méditerranéennes ne sont plus à démontrer ( confèrent sa naissance à Kouba en Algérie en 1952 et l'établissement de ses pénates à Bandol dans le Var).
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Je me refuse à polémiquer sur les rapports récents de la Cour des Comptes, sur les coûts de réalisation de l'oeuvre muséographique, même sur l'hétérogénéité des collections constatée de visu lors de mes visites de 2013 et 2014. Je suis décidé à renouveler mes séjours au MUCEM, qui offrira toujours une variété étonnante d'expositions fort intéressantes et jouissives intellectuellement. Entre autres pièces remarquable, le public peut admirer dans la galerie permanente "Méditerranée" une superbe charrette sicilienne chamarrée comme pour un corso, provenant des anciennes collections ethnographiques européennes du Musée de l'Homme, charrette qui fit l'admiration de mon grand-père en 1976.
En fait, ce qui m'embête, ce n'est pas le J 4 mais le Fort Saint-Jean, censé abriter ce que l'on veut bien montrer des restes acceptés de feu le musée des ATP. Disons-le sans fard, sans euphémisme, sans langue de bois : nada ou presque.

Il paraît que le Président de la République, lors de l'inauguration du MUCEM en juin 2013, aurait été le seul visiteur à pouvoir admirer dans leur intégralité les surfaces d'exposition du Fort Saint-Jean vouées à la thématique des arts et traditions populaires, nuitamment  "le temps des loisirs". On dit que des fuites d'eau ont nécessité la fermeture de presque toutes les galeries (dont celle des officiers) devant être dédiées à ces collections. On dit qu'on remédiera peut-être un jour à cet état de fait. On dit que de toute manière, les visiteurs s'en fichent du moment qu'ils ont au Fort Saint-Jean un joli panorama à admirer, photographier, mettre sur des selfies.  On dit, on dit... Sophisme !
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De fait, le Fort Saint-Jean, en 2013-2014, se réduisait à une animation historique, à des pantins et marionnettes et à une (étonnante et réjouissante) maquette animée de cirque. Quid des ex collections venues du bâtiment de Georges Henri Rivière, fermé depuis septembre 2005 et devenu depuis un chicot, un chancre, une ruine noirâtre, espèce de blockhaus désaffecté jurant en plein bois de Boulogne, abri de SDF inavouable ?
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Hé bien, ces collections "défuntes", enterrées dans des réserves à la Belle de Mai, ne sont idéologiquement ni exposables, ni conservables : les faire admirer  au public, ce serait de facto sombrer dans la nostalgie paysanne volkisch, blubo, ou bleu Marine... Je vous invite à lire l'ouvrage que l'ancienne conservatrice Martine Segalen consacra aux éditions Stock à la Vie d'un musée (1937-2005), histoire magistrale de la genèse, du triomphe et de la décadence (mot souventes fois interdit de nos jours) du Musée national des Arts et Traditions populaires sis avenue du Mahatma Gandhi au bois de Boulogne, non loin du Jardin d'Acclimatation de sinistre mémoire coloniale. Exclu des médias, dénigré, le Musée des ATP n'eut droit par exemple durant les années 1990 qu'à un reportage télé unique consacré à une expo sur Astérix ! Il n'existait plus, on n'en causait jamais, donc, on n'allait pas le visiter : moins de 20 000 billets annuels vendus, à la fin, dans l'indifférence, le dénigrement et la haine. Georges Henri Rivière (1897-1985) fut accusé de complaisance pétainiste, du fait même des thématiques rurales privilégiées par la muséographie des ATP.  En outre, on alla jusqu'à remettre en cause le choix ou parti pris muséologique qui métamorphosait les galeries des ATP en lieu éthéré, irréaliste et obombré. Qu'avaient à faire les visiteurs de ces costumes bretons sans mannequin pour les supporter, de ces coiffes paysannes fantomatiques et diaphanes suspendues dans le vide, lecture "folkloriste" d'un radical dépouillement évitant tout écueil kitch de reconstitution, tel par exemple en l'ancienne mouture du museon arlaten créé par Frédéric Mistral, donc de fait non Volkisch ! Or, l'accomplissement du rêve de Georges Henri Rivière coïncida avec la mort, l'effacement, de l'ancienne civilisation rurale. Il y avait désormais risque d'anachronisme, péril en une demeure à peine inaugurée, sur le tard (1975).
Ce n'est d'ailleurs pas un hasard si le procès instruit contre cette oeuvre architecturale, ce musée originellement salué comme "d'avant-garde"? fut avant tout un procès pour déconnexion des nouvelles réalités socio-culturelles de la France contemporaine. L'histoire chaotique et mouvementée du musée des ATP, comme après lui celle du MUCEM, fut ponctuée de phénomènes, d'étapes démographiques et livresques significatifs :
- en 1931, lors du recensement, la population urbaine dépassa pour la première fois la rurale ;
- en 1947, le géographe Jean-François Gravier publia Paris et le désert français ;
- en 1967, le sociologue Henri Mendras prophétisa, dans un ouvrage fameux et juste, qui fit alors scandale La Fin des Paysans ;
- à compter de 1975, l'INSEE constata la fin, ou plutôt l'achèvement, l'accomplissement de l'exode rural en France tandis qu'au recensement de 1982, la catégorie socio-professionnelle des agriculteurs exploitants était tombée à 6,8 % des actifs ;
- enfin, le grand sociologue Jean-Pierre Le Goff, parachevant le tout, fit paraître, tel un éloge funèbre, La Fin du Village, une histoire française en 2012.
Tous ces événements, tous ces livres savants, ont condamné sans appel le musée des ATP à finir son existence dans un champ de ruines, à reposer en un cimetière dévasté des vieilles lunes. Le musée des ATP n'avait plus sa place dans la France ouverte, multiculturelle, multi-sexuelle et multiconfessionnelle, branchée en réseaux mondialisés dominés par un sabir globish, ancrée dans les cultures urbaines de masse (massification mercantile ?) du XXIe siècle. Une France vendue à l'ultralibéralisme d'Hayek et Friedman, sans nul complexe ou remords.  Quid alors d'une institution muséale obsolète et rejetée ? Née trop tard, au terme des Trente Glorieuses ?  Nous débouchâmes ainsi sur une tabula rasa assumée par les pouvoirs publics.
 http://www.parisbalades.com/Photo1/photo16e/Musee_des_arts_et_traditions_pop.jpg
Mais les ATP,  ne l'oublions pas, c'était aussi l'histoire des mentalités, beaucoup enseignée en fac en Histoire moderne : l'école des Annales, Vovelle, Mandrou, Delumeau étaient-ils des institutions, des revues et professeurs fascistes pétainistes nostalgiques de "la terre qui ne ment pas"? 
Le film biopic qu'Ariane Mnouchkine consacra à Molière en 1978 était-il néo-nazi Volkisch ?
Les travaux du grand historien Robert Muchembled sur la culture populaire ancienne étaient-ils Blut und Boden ?
Ils faisaient tous de l'Adorno quand les politiques se mirent à faire du Bourdieu : ce fut une volonté politique qui décida de laisser péricliter le musée des ATP prétendument décrété "ringard". C'est donc une volonté politique qui traîne les pieds dans la non exposition au Fort Saint-Jean de collections inavouables, suspectées de pétainisme attardé, ne correspondant pas à la conception même, au programme même du MUCEM. Tout cela s'appelle hélas de l'idéologie. Mieux, c'est une doxa, une phraséologie comme celle des ex staliniens et des ultralibéraux actuels.
Dommage...
Prochainement... Hé bien, nous verrons...

samedi 20 juin 2015

Marionnettistes et ventriloques : une incursion vers le cinéma fantastique avec Louis Valdès, André Tahon et Jacques Courtois.

Mais dis moi tout marionnettiste
J'ai des ficelles à mon destin
Tu me fais faire un tour de piste
Mais où je vais je n'en sais rien
Mais dis moi tout marionnettiste
Mon cœur de bois soudain s'arrête
Que feras-tu de tes artistes
Après la fête

(Pierre Bachelet : Marionnettiste)

Après que le Conseil du Roy eut décidé ce que l'on sait sur la Samaritaine, les urbanistes et autres architectes ultralibéraux purent se déchaisner tout leur soûl. En peu de décennies, ils fyrent du passé de Paris table rase (ainsy que l'avoit été la teste du roy Philippe dit Auguste), aboutissant à métamorphoser la capitale du royaume à la semblance de la mégalopole de Cathay qui avoit nom Shangaï. (Mémoires du Nouveau Cyber Saint-Simon)
 

L'ambivalence de l'art de la marionnette n'a jamais cessé de fasciner l'adulte que je suis devenu : à la fois apparentée aux arts et traditions populaires et à une forme plus savante de spectacle (je songe aux célèbres marionnettes de Salzbourg), la marionnette nous interpelle. Ne représente-t-elle pas un microcosme bien particulier, certes rattachée au merveilleux enfantin, au conte, à l'épopée (l'opera dei pupi en Sicile, avec la geste des paladins de France, Roland et Charlemagne) mais aussi susceptible de rébellion, de subversion, de détournement guignolesque vers une certaine critique sociale et de l'autorité ? 
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La marionnette, le pantin, que l'on prétend puérils, ne peuvent-ils pas, à l'occasion, transmuter, se métamorphoser en objets terrifiants ? 

J'évoquerai pour commencer trois grands maîtres français des tréteaux de maître Pierre ayant vécu au XXe siècle, avant de vagabonder vers d'autres horizons plus inquiétants. Je sais l'art du manipulateur de poupées universel : il suffit de visiter pour cela les collections du musée Gadagne de Lyon. L'Afrique noire, la Turquie, la Grèce, l'Asie, ont leurs traditions propres, qui nous fascinent. 

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Je commencerai par la figure géniale et regrettée de Louis Valdès, emporté prématurément. Né Louis Auguste Petit en 1922, il devint célèbre grâce à la télévision française : la Piste aux Etoiles lui offrit une tribune où il put exprimer son talent.

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Pour ma perception personnelle de Louis Valdès, il me faut remonter à 1985, année de sa redécouverte au hasard d'une émission de Pierre Tchernia. A l'occasion d'une émission où étaient mêlées les versions animées d'Astérix et d'Obélix, Pierre Tchernia effectua une incursion dans le passé en noir et blanc, dans la mémoire audiovisuelle, au temps de l'ORTF. Des images peu nettes, presque furtives, ressuscitèrent une séquence oubliée de La Piste aux étoiles de Gilles Margaritis remontant environ à 1964 (bien que votre serviteur confesse s'être souvenu de rediffusions déjà intervenues au cours des années pompidoliennes) : c'était "le Pierrot de Valdès".
Le personnage à fils, manipulé par Louis Valdès, ôtait un masque, et, sur fond d'adagio d'Albinoni, révélait un visage aux yeux immenses, d'une tristesse nonpareille. Savait-on (savais-je ?) que cet adagio fameux en sol mineur n'était qu'un faux daté de 1945, dû à Remo Giazzotto, à partir de fragments récupérés d'une basse chiffrée parmi les vestiges de la bibliothèque de Dresde, morceau fictif, reconstitué, qui ne fut publié qu'en 1958 ? De même en est-il pour le concerto pour hautbois de Domenico Cimarosa, composé en réalité par le chef d'orchestre britannique illustre Sir Adrian Boult en plein XXe siècle.

Longtemps, j'ai pensé que la mort prématurée de Louis Valdès, dès 1965, fauché en plein commencement d'une célébrité enfin survenue, s'expliquait par un suicide. Il n'en était rien : le cancer l'avait foudroyé, comme plus tard l'immense acteur Bernard Noël.

Il est dit que la plupart des marionnettes conçues par Louis Valdès n'ont pas survécu, qu'elles ont été détruites par ce créateur spécial, un des premiers à ne pas se dissimuler lorsqu'il manipulait ses pantins. Les quelques créations parvenues jusqu'à nous de ce poétique enfant de la balle, qui connut les horreurs de la déportation pour avoir fréquenté les Tziganes, peuvent être admirées au musée Gadagne de la marionnette de Lyon, aux côtés de créations universelles mais aussi locales, comme Guignol, le Turc Karagueuz, le liégeois Tchantchès ou l'amiénois Lafleur.
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Le cas d'André Tahon nous est plus familier, bien que sa disparition le 28 août 2009, suscita une indifférence cuistre et révoltante, au contraire, par exemple, du décès de Claude Laydu, père de Nounours.

Pourtant, André Tahon, au même titre par exemple qu'un Albert Barillé ou qu'un Serge Danot (Le Manège enchanté) participa à l'éléboration du monde enchanté de mon enfance, via la télévision, grâce à ses personnages étonnants : Papotin, Ploom la chenille, les souris de Sourissimo avec leur éternel bonnet de nuit et leur inoubliable ennemi Chat-Gaga. Il avait aussi conçu les Marottes, sortes de poupées russes en costumes folkloriques.
André Tahon naquit à Saint-Maur-les-Fossés en 1931. Comme Louis Valdès, il connut les music halls et cabarets, avant que la télé le découvrît et le rendît célèbre.

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Avec Jacques Courtois, enfin, nous abordons la frontière du genre, le domaine de la poupée de ventriloque.
Jacques Courtois naquit le 5 avril 1928 à Calais. Lui aussi écuma les cabarets avant que Jean Nohain, via la célèbre émission de variétés Trente-six Chandelles, le propulsât vers la gloire.

Omer fut sa marionnette fétiche, mais il conçut aussi le Canard et le chien Hercule. Dois-je l'avouer ? Omer me faisait peur ; je lui trouvais quelque chose d'inquiétant, de peu rassurant, lorsqu'il passait à la télé. 
L'anthropomorphisme d'Omer (qui fit aussi les délices du défunt cirque Spirou) suscitait en moi la gêne.
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Je ne sais s'il me faut attribuer cette peur enfantine, puérile, que je ressentais chaque fois que je voyais une photo d'Omer dans un article à Jacques Courtois consacré ou un numéro du grand ventriloque dans un sketch télévisé à l'animation de la bouche du pantin qui lui conférait une vie de mauvais aloi.
Plus tard, Omer me fit irrésistiblement penser à ce personnage inquiétant du meneur de revue de Cabaret de Bob Fosse (1972), interprété magistralement par Joel Grey, être localisé à la frontière de l'humanité, presque proche de l'androïde ou du Golem, tant l'on peu douter de sa nature humaine. Joel Grey, avec son maquillage étrange et équivoque, ressemble à une mécanique, à un robot parfaitement programmé, manipulé par quelque invisible deus ex-machina. Le doublage en français accentue cette bizzarerie jusqu'au malaise. La voix de Joel Grey est perçue comme surnaturelle : est-il un pantin ou un humain ?
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Omer me permet d'effectuer une transition tout en douceur vers le cinéma et la télévision fantastiques : la thématique de la marionnette et de son mentor lui insufflant une vie artificielle a très tôt inspiré les cinéastes.
Commençons notre cheminement, notre vagabondage avec Gabbo le ventriloque, The Great Gabbo (1929) de James Cruze, avec Erich Von Stroheim, un Von Stroheim déchu de son état de réalisateur après le naufrage de Queen Kelly et consort.
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Gabbo est la source, la fondation, le socle, le mythe fondateur de tout ce qui suivit, de toutes les fictions qui en copièrent la trame jusqu'à nos jours, et ce, tout récemment comme nous l'allons lire. Le film aborde le thème de la possession du manipulateur ventriloque par son pantin, de l'artiste retranché peu à peu de la société normale et qui finit par sombrer dans la folie.
Erich von Stroheim devance Michael Redgrave et Cliff Robertson dans cette thématique d'épouvante et d'effroi, de schizophrénie même.
Gabbo fut le premier film parlant d'Erich von Stroheim. La figure de la marionnette, son motif obsédant, rejoignent ceux du double, du succédané de soi, ou du fils adultérin et cloné de soi. La marionnette manipule son manipulateur, se substitue à lui, tandis qu'il devient victime d'un dédoublement de la personnalité. C'est un démon.


Ce type de marionnette inquiétante ne peut qu'engendrer, susciter, une peur atavique et primale. La poupée de ventriloque apparaît tel un greffon, un parasite, le fils ou frère siamois, l'autre je, l'alter ego indissociable, insécable : une monstruosité à l'état pur.
Mais le pantin de ventriloque est aussi rébellion : il finit par gagner son autonomie de haute lutte, son indépendance, par s'émanciper de son créateur animateur (anima égale âme, pneuma souffle...), par vouloir le tuer. C'est le parricide : la psychanalyse oedipienne règne ici en maîtresse.
Il est étrange et en même temps évident, à l'exception du cas ultime, le plus récent de la mise en images animées du thème, que le ventriloque et la poupée soient tous deux des hommes.
Tout paraissait avoir été d'emblée dit et montré, démontré dans Gabbo : c'était méconnaître l'inventivité des scénaristes et réalisateurs, de la faculté de renouvellement, d'enrichissement de la thématique par des apports neufs, jusqu'à l'interprétation paroxystique d'un Michael Redgrave dans Au Coeur de la nuit.
Au Coeur de la nuit  (Dead of Night) est le premier film fantastique à sketches, oeuvre filmique britannique collective réalisée en 1945. On en retient généralement, avec juste raison, l'ultime partie, Le Mannequin du ventriloque (The Ventriloquist's Dummy), due  à la caméra inspirée d'Alberto Cavalcanti, bien que le scénario se soit basé d'une histoire du scénariste John Baines.


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Le prénom du pantin est Hugo et Michael Redgrave, halluciné, est persuadé que la poupée le pousse à commettre des actes répréhensibles : elle a pris vie et le possède, le contrôle. Tout s'achèvera par la destruction de la marionnette, après une montée progressive de l'angoisse.
L'histoire fut recyclée dans La Quatrième Dimension, célèbre série américaine de Rod Serling.  L'épisode notable inspiré directement de Dead of Night apparaît dans la troisième saison épisode 33 (1962) : La Marionnette, avec Cliff Robertson, comédien notoire qui joua dans l'adaptation théâtrale puis cinématographique du roman de Daniel Keyes Des fleurs pour Algernon.
La Marionnette renouvelle partiellement le thème : le ventriloque, alcoolique, est là encore persuadé que Willie, son pantin, est vivant : il tente de le remplacer par un autre, mais Willie résiste, anéantit son rival. La poupée de ventriloque devient définitivement une créature maléfique, une préfiguration intelligente des films douteux et médiocres Chucky et Annabelle.
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Willie est un contemporain d'Omer, et possède quelques ressemblances discrètes avec lui, non seulement du point de vue de la facture (je songe ici au système d'articulation de la bouche proférant des paroles plus ou moins insolentes), mais aussi par son entregent.
Enfin, après une éclipse, le thème se ressource une dernière fois dans American Horror Story saison 4 Freak Show (2014-2015), où, pour la première fois, la marionnette est de sexe féminin. La série se veut un hommage horrifique à tous les classiques du genre depuis au moins 1930 : elle multiplie les citations et références.
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Chester le ventriloque a constitué un duo avec sa poupée Marjorie. Neil Patrick Harris interprète Chester. Marjorie "agit" à la place de Chester, ou plutôt, dans sa folie, Chester voit Marjorie commettre ses forfaits, ses crimes, ses assassinats. Il y a "décorporation" de Chester en Marjorie. Ils constituent un duo contrasté d'amour-haine. La marionnette s'incarne, prend les traits de la comédienne trisomique Jamie Brewer, qui parle à Chester, envahit son cerveau, agit en toute autonomie. Il s'agit là d'un transfert schizophrène intégral de personnalité, d'un vecteur fantasmatique par l'intermédiaire imaginaire et le truchement virtuel duquel Chester commet en fait ses meurtres. Il échoue d'ailleurs à "tuer" Marjorie : il se tuerait lui-même. A la fin, Chester se livre à la police après une ultime atrocité.  Ce cas est le plus abouti, le plus achevé du dédoublement de soi. Je est un autre, a écrit Arthur Rimbaud. TREMBLEZ BRAVES GENS !
La bédé, en plus humoristique, n'a pas ignoré le thème : je pense par exemple à un vieux gag de l'Agent 212 de Kox et Cauvin remontant à 1977. En toute impunité, un ventriloque se jouait de la naïveté du policier en faisant proférer des injures anti-flic à sa poupée.

Prochainement sera abordé l'épineux problème des ATP au MUCEM en général et au Fort Saint-Jean en particulier. A bientôt sur ce blog.

samedi 6 juin 2015

De la distribution calamiteuse des films de genre en France (fantastique, horreur, SF et désormais thrillers).

Comme on traite son chien, on traite son peuple. (Réflexions du nouveau Paul Léautaud)

L'un de mes gags favoris de "Gaston Lagaffe" de Franquin a longtemps été le n° 604, publié dans "Spirou" au début de l'année 1970. Il s'agissait de l'invention du cosmo-coucou, pour laquelle Gaston parvenait à la signature d'un contrat de commercialisation avec M. Demesmaeker à l'instant même où, connaissant ses premières avaries, notre coucou spatial émettait des "bip crac" inquiétants. (Souvenirs personnels)

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Il faudra bien s'y faire, s'y résigner : depuis le grand bazarnaum et schproum automnal suscité par le navet oubliable Annabelle (voir un précédent article sur ce blog), les distributeurs, comme à plaisir, ont décidé de pénaliser les malheureux spectateurs cinéphiles amateurs d'épouvante et autres frissons qui ne chahutent pas. 
Non contents de déjà sous-distribuer chroniquement ces films, jusqu'à présent à peine au-dessus du seuil des 200 copies hexagonales, ils viennent depuis janvier dernier d'en réduire la voilure. 
Il peut arriver souventes fois, ô paradoxe, qu'un film d'art et essai comme Taxi Téhéran ou Le Labyrinthe du silence bénéficient d'une combinaison de salles plus avantageuse que, par exemple, It Follows, Lost River (moi qui escomptais voir un Matt Smith post Doctor Who !) ou encore dernièrement Ex Machina. Quant aux remarquables Horsehead et Goodnight Mommy, ils ont fini au fond du trou avec moins de dix copies pour toute la France. Depuis le 1er janvier, quelle que soit leur qualité, onze films fantastiques et de SF m'ont échappé à cause de leur distribution minable, réduite dans la plupart des cas à 160 copies seulement réparties pour l'essentiel  dans des mégaplexes emplis d'émules infréquentables du chahut. 
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Fait plus grave : les thrillers sont désormais touchés par cette politique drastique depuis la fin de cet hiver, eux aussi restreints à des combinaisons ridicules qui les rendent invisibles dans les petits cinémas des bourgades naines plus à même, afin de survivre, de programmer de l'art et essai (que j'apprécie aussi : j'ai le droit d'afficher mon éclectisme, diantre !).
  

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Les deux affiches ci-dessus figurent deux des longs métrages d'angoisse qui m'ont récemment échappé à cause de leur manque flagrant de copies : ce n'étaient pas des blockbusters pour les distributeurs et les exploitants, au contraire des indénombrables comédies françaises produites à la tonne et qui finissent par surmultiplier les flops retentissants du fait de leur surabondance ordurière proliférante obstruant le marché et "bouchant les artères" des écrans, rendant inaccessibles presque toutes les autres productions ne bénéficiant pas du label art et essai. L'intellectualisme français déteste le cinéma de genre. Non mais ?  Voyez-vous un film d'épouvante autrichien ou japonais classé art et essai ? Il n'en est pas question : ce serait RIDICULE.
Autrefois, existaient les vidéoclubs qui permettaient de rattraper le coup pour une partie de ces films (moins sabotés que maintenant), mais ils ont dépéri et mis la clef sous la porte sous l'assaut du téléchargement et du streaming, les gens (les jeunes ?) préférant s'aveugler sur un mini écran de tablette ou de smartphone avec la VOD plutôt que de goûter confortablement à une séance télé authentique avec un DVD ou un blu-ray, avec un support matériel argenté ou doré.

La prochaine fois, rendez-vous est pris avec les marionnettistes et autres poupées de ventriloques qui vous feront rire ou trembler. 
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A bientôt sur ce blog...