mardi 27 août 2013

Luc Lafnet, père putatif de Spirou ?

 Calc calc calc ! Muohcta ! (Z comme Zorglub, par Franquin et Greg (1959))



Qui de nos jours connaît le peintre, illustrateur et dessinateur Luc Lafnet (1899-1939), mort prématurément à quarante ans ? Il semble plus célèbre pour ses illustrations de textes érotiques, quoiqu'il fût aussi un peintre religieux, que pour sa contribution capitale à la naissance de Spirou, le 21 avril 1938.




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Une peinture présentable de Luc Lafnet.
Des années durant, depuis que j'eus lu, en 1973, le numéro spécial 33e anniversaire de Spirou (n° 1682), dans l'album relié du journal n° 118 qu'enfant, je venais d'acquérir, j'avais été persuadé, que le seul véritable créateur du personnage du petit groom du Moustic hôtel était Robert Velter alias Rob Vel (1909-1991), par ailleurs voisin d'un autre repreneur du personnage vedette, Jean-Claude Fournier.



Si vous en avez l'occasion, replongez-vous dans la page de couverture du numéro 1 du Journal de Spirou, avec sa fameuse planche inaugurale intitulée la Naissance de Spirou. On y voit un mystérieux dessinateur barbu fumant la pipe, l'allure bohème, croquer le héros et lui insuffler la vie. La publication du fac-simile du même numéro comme supplément du Spirou n° 2097 en 1978 puis le dépouillement intégral de tout l'hebdomadaire que j'entrepris à compter de 1991 à l'occasion de mes recherches doctorales renforcèrent ma (fausse) conviction.
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Cet artiste, pensais-je, c'était Rob Vel jeune, en 1938. Que nenni, parce que quelque chose clochait : Robert Velter n'avait aucunement cet aspect, encore moins cette coiffure et cette barbe.


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Hé bien, je viens d'apprendre le nom du véritable dessinateur de la toute première planche de Spirou : c'était Luc Lafnet, qui fit en cette planche son autoportrait caricatural. En quelque sorte, il est le créateur et l'animateur de la première apparition de Spirou, donc son père putatif !
La mort prématurée de Lafnet, assistant de Rob Vel avec Davine alias Blanche Dumoulin, épouse de Velter (1895-1975) d'un cancer du pancréas dès le début de l'automne 1939, brisé par la disparition de sa fille à treize ans d'une leucémie, n'a pas contribué à sa notoriété bédéphilique.
Je devais effectuer cette mise au point, confessant une erreur dans mes travaux de recherche, car tributaire de sources inexactes.
La révélation vient de m'être faite dans le numéro spécial hors série que le périodique Beaux-Arts magazine vient de consacrer aux 75 ans de Spirou. Cette revue cartonnée (et fort belle et complète, surtout concernant mon idole Franquin) est indispensable tant elle comporte des révélations sur l'histoire véritable de ce pilier de la bédé franco-belge !
Il est intéressant de savoir que Rob Vel est mentionné dans le dictionnaire Larousse à l'article  Spirou  alors que ni Joan Fontaine, ni Olivia de Havilland, ni Jean Lorrain, ni Graham Hill, ni Micheline Presle n'y figurent !

samedi 17 août 2013

Des fossoyeurs de la musique française des années 1870-1945.

Il fut une époque où des salafistes du dodécaphonisme adorateurs d'Anton Webern décrétèrent que toute la production musicale française des années 1870-1945, à de rares exceptions près (le Debussy terminal d'En Blanc et Noir notamment), était bonne à jeter à la poubelle car sclérosée dans le respect de la tonalité.
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Ainsi, il ne fut guère étonnant de constater que, dans une émission consacrée à l'histoire de la musique, L'Homme et la Musique (1982), Sir Yehudi Menuhin réduisait la musique française du XXe siècle aux fanfares de villages, sans même qu'il eût mentionné l'existence de Maurice Ravel !

Les sectateurs de la musique sérielle sont peut-être partiellement responsables de cette regrettable omission. Il est vrai que pour eux, tout ce qui n'appartenait pas à la filiation de Webern était irrémédiablement suspect d'académisme fossilisé. Ils vouèrent aux gémonies une foultitude de compositeurs honorables, parfois de très grands maîtres comme Albert Roussel (1869-1937)
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 et Francis Poulenc (1899-1963),
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 pour la France mais aussi nombre d'indépendants étrangers réfractaires à tout systématisme, à tout catalogage : Jean Sibelius, Igor Stravinski, Sergueï Prokofiev et Dimitri Chostakovitch passèrent sous leurs fourches caudines. Ils adulaient la déstructuration éclatée en cellules de timbres, l'atonalisme libre précédant la codification des séries de douze sons par Arnold Schoenberg, critiquant même ce dernier et Alban Berg, autres grands de l'école de Vienne, parce que suspects de relents romantiques attardés.
Ils mirent sous le boisseau des "petits maîtres" qu'on oublia, que l'on tarda à redécouvrir, jusqu'à ce que de hardies et audacieuses maisons de disques pionnières osassent enregistrer leurs oeuvres : ainsi en fut-il d'Albéric Magnard (1865-1914), au lyrisme âpre et rythmé, post-brucknérien, annonçant parfois le dernier Roussel et Bela Bartok
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 compositeur  "1900"  féministe et dreyfusard dont la quatrième symphonie (enregistrement pionnier de Michel Plasson en 1983) soutient la comparaison avec la troisième de Scriabine Divin Poème, et de l'amiral Jean Cras (1879-1932),
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 dont l'amateurisme éclairé fut moqué (comme celui d'Emmanuel Chabrier en son temps). Or, j'estime que le concerto pour piano de Jean Cras, que j'ai découvert en 1999 (en particulier le deuxième mouvement) est un chef-d'oeuvre indispensable à l'écoute du mélomane éclairé.
De plus, ne faut-il pas dissocier, une fois de plus, l'oeuvre des auteurs, lorsque ceux-ci eurent des opinions politiques douteuses ? (le royalisme de Vincent d'Indy,
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 son nationalisme intransigeant et son antisémitisme, de même celui de Florent Schmitt,
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 par ailleurs favorable à Vichy) Cela interdit toutefois à mes yeux de boycotter tout ce qu'ils composèrent, parce qu'il y a quand même des choses valables voire géniales chez eux (La Tragédie de Salomé de Florent Schmitt, impressionnant drame musical symphonique orientaliste dansé dont la rythmique échevelée - la Danse de l'effroi notamment - annonce le premier Stravinski de l'Oiseau de Feu ; les dernières oeuvres de chambre de d'Indy, plus dépouillées composées à Agay dans les années 1920 etc.). Parfois, il faut savoir faire abstraction des ombres entourant et nimbant certains artistes... au profit des lumières.
Désormais, la musique a évolué, le dodécaphonisme est daté et les maîtres des années 1870-1945 enregistrés car rejoués. Justice est faite !

samedi 10 août 2013

Doctor Who : le nom et la nature du Docteur. Une spéculation.

Les officines soi-disant culturelles n'abritent plus que des milliers de salieristes stipendiés (Cyber Léon Bloy).

Tandis que Matt Smith, 11e Doctor Who, s'apprête à tirer sa révérence, à céder la place à Peter Capaldi, il est bon de se pencher sur une énigme majeure soulevée de longue date par la série, en particulier lors du 14e épisode clôturant la diffusion de la 7e saison, après la mystérieuse apparition finale de John Hurt. Ceci est une interprétation strictement personnelle, qui, je pense, diffèrera sensiblement des explications et solutions apportées prochainement par Steven Moffat et les autres scénaristes et auteurs de la série britannique.

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On le sait, la conclusion de la 7e saison de Doctor Who, suspendue au visage buriné et tavelé de John Hurt et à l'envoi du générique de fin de l'épisode Le Nom du Docteur a désorienté les téléspectateurs et a suscité une abondance de commentaires et de réflexions.
L'hypothèse selon laquelle John Hurt serait un Docteur primitif, originel, n° 0, avant qu'il soit le Docteur, paraît ne pas tenir la distance, bien qu'elle soit séduisante en elle-même. Or, cette première version - si c'en est bien une - témoignerait qu'à l'origine, le Docteur appartenait aux forces obscures, qu'il a quelque chose à se reprocher, que son passé est trouble, non dénué de taches. 
Pourquoi est-il interdit de prononcer le nom du Docteur, pourquoi ce refus obstiné qu'on l'entende ? Parce que Doctor Who était quelqu'un d'autre, de négatif, qui a fauté autrefois ? Parce qu'il serait responsable d'une tragédie galactique, pour ne pas écrire universelle ? Dernier Seigneur du Temps, ne serait-il pas la cause de l'extinction des siens ? 
Serait-il une sorte d'entité du Mal séparée du Bien, Docteur noir, manichéen, rebellé parce que, tel le serpent de la Genèse, il aurait voulu jouer au Porteur de Lumière ? Serait-ce une relecture du péché originel, de l'Arbre de la Connaissance avec le fruit défendu et le serpent tentateur d'Eve, ou encore, de quoi estomaquer les téléspectateur, susciter leur vertige, une réinterprétation du mythe de Prométhée, puni pour avoir apporté le feu (donc la Connaissance) aux hommes ?
Tel m'apparaît personnellement John Hurt en docteur maudit, désespéré, interdit...
En ce cas, l'Arbre avec ses ramifications, ses réseaux de branches, ne rappelle-t-il pas les enchevêtrements de neurones, ou, encore mieux, à l'échelle macroscopique, la toile (web) des super amas galactiques ?
Dieu fit l'Homme à son image, mais je ne pense pas que John Hurt soit le Créateur, plutôt celui qui le contra...
le Docteur ou anté-anti-Docteur inconnu est un blessé de l'Univers. 
L'autre hypothèse (sans doute celle-ci sera retenue) rappelle le hiatus entre le téléfilm de 1996 (Le Seigneur du Temps) où le 8e Docteur, Paul McGann sévissait et la saison 1 de la série ressuscitée en 2005 avec le 9e Docteur Christopher Eccleston. 
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Les puristes ont toujours regimbé à l'idée qu'aucune passation de pouvoir n'avait eu lieu entre les incarnations n° 8 et 9 du Doctor Who, du moins à l'écran. Cela créait un vide scénaristique susceptible d'être tôt ou tard comblé par l'astucieux Steven Moffat et son équipe. 
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Selon les rumeurs, ce sera chose faite à l'occasion de l'épisode spécial 50e anniversaire de la série culte, où John Hurt sévira contre Matt Smith. La diffusion est annoncée pour le 23 novembre 2013.
John Hurt serait donc un docteur intermédiaire oublié entre Paul McGann et Christopher Eccleston, aux habits hybrides (costume victorien du 8e Docteur mélangé au blouson du 9e). Un Doctor Who banni  pour avoir lourdement fauté, un Docteur déchu et sombre, retiré de la liste officielle, comme ces "vainqueurs" maillots jaunes dopés du Tour de France... Matt Smith, au cours de son périple, de sa quête contrainte, passe par l'étape interdite de Trenzalore avant cette inopportune rencontre avec l'indésirable John Hurt.
Trenzalore est la planète où se situe le tombeau du Docteur. Le Tardis mourant y a échoué, recelant en son sein moribond toutes les lignes de vie du Docteur (même les inavouables ?). John Hurt se localise donc au sein d'une ligne de vie du Docteur occultée volontairement.
Le personnage de Siméon (voir aussi l'épisode La Reine des Glaces), ou plutôt son simulacre rematérialisé, réincarné, lorsqu'il plonge dans la colonne de lumière (les intrications de l'écheveau quantique et multiversel de toutes les vies enchevêtrées de toutes les incarnations du Docteur, de toutes les destinées du panmultivers dirais-je plutôt), ne pourrait-il pas lui-même être une origine plausible de ce Doctor Who-là, de ce maudit hypothétique, de John Hurt, résultat d'une fusion improbable entre Siméon et la Grande Intelligence ?
Vertigineux diriez-vous ?
Dans la saison 4 de la série, l'épisode Bibliothèque des ombres, (première apparition par ailleurs de River Song), l'Intelligence Artificielle mémoire de cette bibliothèque borgesienne, CAL, ne figurait-elle pas sous l'aspect d'une petite fille ? Attention à ce qui trompe et bluffe !
Il faut donc s'attendre à tout... Patience !
Terminons par une note farfelue.
Tenez, par exemple, Jenna Louise Coleman, nouvelle compagne du Docteur, archétype de la brune piquante, irait fort bien dans le rôle de Daisy Belle de Beauregard, un des personnages de la saga de Daniel Wu que ma soeur et moi-même écrivons...
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Addendum :  le nom du Docteur constitue la première question fondamentale de l'univers. En fait, la chronologie des différentes incarnations du Docteur pourrait être totalement à revoir. Le personnage de John Hurt pourrait s'intercaler n'importe quand et pas entre les Docteurs n° 8 et 9.  Il faut se rappeler une phrase du 10e Docteur à Sarah Jane Smith lorsqu'elle lui reprochait de l'avoir abandonnée à cause d'une urgence : celle-ci concernait les Daleks. Donc, le secret du Docteur est lié à la Guerre du Temps...