mercredi 29 août 2012

Margaret, de Kenneth Lonergan, ou de l'art du journal Le Monde de tirer sur les corbillards cinématographiques.

Amis lectrices et lecteurs de ce blog, vous ne l'avez peut-être pas remarqué dans les sorties cinéma de ce jour, tant cette oeuvre est traitée comme quantité négligeable par la bonne presse, mais un film victime comme les longs métrages célèbres d'Erich von Stroheim et Orson Welles de chicanes innombrables sur le montage, de querelles entre réalisateur (mal considéré comme créateur aux States, surtout si c'est la Fox qui distribue) et producteur vient de sortir en catimini, semble-t-il (source Allo ciné) en dix écrans seulement et uniquement en version française !
Les personnes perspicaces bien informées mordues de septième art l'auront compris : je parle du Margaret de Kenneth Lonergan,
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 avec Matt Damon, Anna Paquin et Mark Ruffalo. Le non-événement journalistique hexagonal fait autour du sabotage absolu de la sortie de ce film de près de trois heures le confine à l'anti-schproum  mutique. Or, c'est un scandale digne des déboires d'Orson Welles qui devrait nous interpeler, prouvant que les Etats-Unis du XXIe siècle n'en ont pas terminé avec leurs vieux démons du cinéma maudit à la Amberson ou à la Rapaces. 
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Dans sa rubrique Nous n'avons pas pu voir, Le Monde, d'habitude, confine dans cet in-pace critique, dans ce cul de basse fosse voué aux oeuvres médiocres interdites à la presse, des giga méga nanars français comiques distribués en cinq cents salles joués par les copains d'une ancienne pie grise que je ne nommerai pas sous son nom authentique et qui n'aurait jamais dû sortir de sa fange, petite, petite... Or, ce jourd'hui, Le Monde vient de commettre un impair de taille en déconseillant d'aller voir cette Margaret-là, prétextant que sa poignée de copies n'était qu'en VF ( film mal doublé ?), comme s'il se fût agi de la pire comédie franchouillarde française en-dessous de la ceinture jamais tournée par un toquard ! La rédaction de ce quotidien longtemps respectable jusqu'à ses retournements de veste ultra hayekiens des années quatre-vingt-dix et autres sait-elle qu'elle vient de frapper un déjà cadavre, un film honorable (peut-être pas un chef-d'oeuvre) condamné à ne pas faire d'entrées, à quitter l'affiche pronto,  peut-être à ne jamais être diffusé à la télévision et à sortir en DVD et en blu-ray chez nous ? (c'est actuellement le cas de Tolstoï dernier automne et de Cadavres à la pelle de John Landis, avec le formidable Simon Pegg) Ce film, je ne le verrai sans doute jamais (peut-être en le commandant sur Amazon UK, le vampire du e-ommerce se gobergeant de nos sous). Pourquoi Le Monde n'a-t-il pas recommandé au contraire aux spectateurs d'y aller quand même, parce que l'oeuvre est destinée à ne pas rester plus d'une semaine dans nos salles obscures en y faisant à peine plus de zéro entrées ? Le spectateur doit être seul juge dans l'affaire Margaret, quitte à faire des kilomètres en TGV pour dénicher un cinéma programmant ce titre mis à mort d'avance. La presse négligente ne s'est pas informée sur le sabordage en oeuvre... Il aurait suffi qu'un journaliste futé et intelligent, fureteur aussi, rat de web surtout, se rendît sur le site du Guardian pour voir le bien-fondé des avanies anti-réalisateur subies par Kenneth Lonergan. Alors, la phrase ce Margaret-là aurait pris un sens tout autre, signifiant le Margaret voulu, imposé par le producteur et le distributeur, non monté selon les voeux du réalisateur.

Matt Damon joue dans ce long métrage ; sa présence au générique en cautionne la valeur certaine. Matt Damon ne tourne pas n'importe quoi comme un Nicholas Cage (toujours bien distribué, lui, même après une mauvaise critique unanime).
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Mon regretté professeur d'histoire de l'iconographie contemporaine et de l'analyse de l'image avait dit, en 1985 (il parlait à l'époque des cinéastes ayant osé tourner sur la Commune de Paris de 1871), que tous les moyens étaient bons pour couler un film. Vingt-sept ans après cette observation acerbe et exacte, Margaret nous fournit une preuve supplémentaire que ce prof de fac avait raison, que ses assertions étaient fondées.

1 commentaire:

  1. Pour la première fois, Le Monde vient de reconnaître ô combien Margaret est un film saboté. Il se plaint de ses 407 entrées sur 10 copies en VF, après avoir recommandé de ne pas aller le voir. Tandis que Studio Ciné live et Première défendaient Margaret, Le Monde a joué la carte du naufrage, contribuant à l'invisibilité prochaine d'une oeuvre qui s'en vient rejoindre dans l'enfer des films modernes perdus le Black Robe de Bruce Beresford (sauvagement déprogrammé en 2007 par Canal satellite !), le Moulin de Daudet, 1805 etc., longs métrages de ces 20 dernières années qui n'ont pas un fifrelin de chance d'être diffusés un jour sur une chaîne de télévision française !

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