mercredi 30 mai 2012

Evocation des galeries d'anthropologie du Musée de l'Homme.



Ceci est l'évocation d'un souvenir lointain, mais aussi d'un événement fondateur de mon existence. Ce court texte, écrit à l'origine en 2001, a été actualisé pour les besoins de ce blog. 

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Evocation du musée de l’Homme

C’était le 21 juillet 1976 à 10 heures du matin...Les anciennes vitrines du Musée de l ’Homme consacrées à l ’anthropologie biologique contenaient des trésors méconnus, parfois-je dirais même souvent-stupéfiants et tératologiques.
D’emblée, le visiteur qui découvrait les lieux débouchant au premier étage par le grand escalier de gauche voyait s ’offrir à son regard la vitrine des nains et des géants, squelettes plus ou moins célèbres de « Bébé »,
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le bouffon du roi de Pologne Stanislas Lecszinsky, du moins, je le crois, d ’un Masai de 2 mètres et d ’un homme de 2m14 à la mâchoire déformée et prognathe.
Que dire du crâne de Descartes,
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 des squelettes comparés d ’un homme, d ’une femme, d ’un Homo sapiens, d ’un chimpanzé, d ’un gorille, d ’un gibbon ou d ’un atèle? Et ces os édentés d ’un fœtus,
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 d ’un enfant d ’ environ un an ou cette dépouille poussiéreuse atteinte de rachitisme?
Puis, venaient les vitrines consacrées aux déformations et parures corporelles rituelles : peaux humaines tatouées maori, crâne surmodelé papou,
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 pied réduit et bandeletté de Chinoise dans le formol, encore des crânes mayas, étirés vers d’arrière, des crânes bretons ou auvergnats du même genre, des pièces de collection phrénologiques de Gall,  des photos de femmes africaines aux têtes allongées, de femmes-girafes ou à plateaux !
J'’ai oublié au passage de dire qu’aux côtés des squelettes humains et simiens figurait la photographie jaunie de l’Améranthropoïde*, singe atèle géant, créature mythique et cryptozoologique dont d’authenticité n’a jamais été prouvée.
Ensuite, la série des fœtus humains baignant dans des flacons d’ « alcool », des préparations colorées, âgés de 8 à 18 semaines, transparents,  parfois moisis, d’autres fois lyophilisés, terrorisait les visiteurs les plus jeunes !
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* Il pourrait d’agir d’un spécimen pathologique d’Atèle atteint d’acromégalie dont la queue aurait été amputée à cause d’un accident. A moins que cela soit un simple canular (photo truquée).

On parvenait doucement au summum de la « muséologie de la peur » avec la collection des têtes réduites des Indiens Jivaro-j’ai appris depuis que  leur vrai nom était les Achuar ou Chuar –et Munduruku.
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Un visiteur-mon père en d’occurrence-pouvait s’exclamer :  « de plus en plus surprenant ! »
Enfin, attendues et redoutées, venaient les vitrines consacrées à la momification, jeu déroutant d’aller-retour entre la fascination et la répulsion. Le prince péruvien aux longs et gras cheveux noirs, proche de Rascar Capac, coudoyait le classique égyptien dans son sarcophage, en fait une momie éthiopienne d’Axoum !
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Il était en position fœtale, cachant de ses mains décharnées le visage qu’il n’avait plus ! Il y avait même des momies Guanches !En face, bébés, avortons et enfants chiliens ou nord-amérindiens difformes, noirâtres, victimes de sacrifices entourées de cordes, notamment une momie naturelle d’enfant “chinook”, objets si indicibles que ma mémoire éveillée les occulta vingt ans durant, se retrouvaient en bonne compagnie : la momie grimaçante et hideuse de l’enfant gaulois des Martres-d’Artières, près de Riom, découverte en 1756 et couchée dans son cercueil. La peau racornie de la momie inca ressemblait, avec ses striures et ses granulés, ses quadrillages, en particulier aux genoux, à celle des meules de fromage. Enfin, ce fut Saartjie Baartman , la « Vénus hottentote », statue de terre cuite que je crus moulée sur un cadavre, momie d’un nouveau genre ( ce qui s’avéra exact par la suite, mais le squelette n’était pas à l’intérieur du moule, tant s’en faut !) !
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En 2015, si tout va bien, les momies retrouveront leur place d’honneur au Musée de l’Homme, comme autrefois ! La momie « chachapoya » a ouvert le bal dès février 2007 ! Dans une section “au-delà” de l’expo “l’Homme exposé” (2007-2009), elle s’est retrouvée en face des vitrines contenant les momies “chinook” et des Martres d’Artières et à proximité de la momie d’Axoum ! Reconstitution inconsciente de la muséographie de 1976 s’il en est !

dimanche 27 mai 2012

Hommage à Eddy Paape et à d'autres dessinateurs oubliés par les nécrologies officielles.

"Le navire-monde friedmano-hayekien n'est pas un Titanic simplement balafré sur un seul de ses flancs, mais éventré en fait sur toute la circonférence de sa coque". 

In : Moi, aphorismes de Moi dans "Réflexions eschatologiques sur l'agonie de l'ultralibéralisme" New Paris, presses de Pataphysique ajustée, AD 2107.

Chers lecteurs qui acceptez de bien fréquenter ce blog polémique et acerbe, de plus en plus marqué par une acidité critique certaine et justifiée, je vous convie aujourd'hui à rechercher, dans la presse quotidienne française parue depuis environ mi septembre 2011, si le moindre article nécrologique journalistique de papier a été consacré aux trois auteurs de bandes dessinées classiques de l'école franco-belge Eddy Paape, Gilles Chaillet et Albert Weinberg...
 
Il est cruel de constater qu'Eddy Paape (1920-2012),
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qui était l'un des derniers représentants vivants du Spirou des années cinquante, qui compta tout de même deux séries notables à son actif, Luc Orient dans Tintin (scénarisé par Greg !) et Marc Dacier  dans Spirou (sans omettre quelques épisodes de Jean Valhardi avant la magistrale reprise de Jijé de 1956) n' a semble t-il jusqu'à présent fait l'objet d'aucun article d'hommage dans la presse sérieuse officielle. On me dira que la SF a mauvaise réputation, que les reporters à la Marc Dacier, c'est ringard, que Paape avait un dessin convenu, que dis-je, académique et non novateur (les gros mots sont lancés !), mais tout de même ! Je me souviens que la reprise intégrale en albums (certes brochés) de la série Marc Dacier aux éditions Dupuis entre 1980 et 1982 fut un grand événement. De plus, le cycle de Terango de Luc Orient marqua fortement mon esprit d'enfant et de préadolescent. Je n'ai jamais oublié Argos et Sectan, ni le docteur Kala  (ah, ses lunettes et sa barbe professorale qui rappelaient à la fois Mitacq et un prêtre que j'ai connu !) et Eurocristal (prémonition du CERN ?)...

De même, l'injustice est flagrante pour Gilles Chaillet,
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 disparu en septembre 2011 dans une quasi indifférence cuistre et insultante, qui se tira avec les honneurs de la reprise périlleuse de Guy Lefranc, abandonné au milieu du gué par un Jacques Martin débordé (après un intermède Bob de Moor), et dont l'Axel Borg soutien la comparaison avec celui de son créateur.

Quant à Albert Weinberg,
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 mort quelques jours après Gilles Chaillet, même si Dan Cooper  ne vaut pas Buck Danny (sommet de la BD d'aviation classique selon moi), bien que créé pour le concurrencer en 1954, il fut tout de même un des grands auteurs du Tintin des années cinquante-soixante et soixante-dix, de l'époque des rédac'chefs Fernez, Dehaye et Greg, avant de passer à Super As. Justice devrait être rendue, car il n'y a pas dans le 9e Art que les recherches formelles (souvent éblouissantes) de la création adulte qui comptent...

dimanche 20 mai 2012

L'exposition "Berthe Morisot" du musée Marmottan négligée.

C'est presque un truisme d'écrire que Berthe Morisot n'a pas la reconnaissance qu'elle mérite (malgré une exposition en cours et un téléfilm dont le tournage vient de s'achever en Limousin) comme maintes femmes artistes, à l'exception de Camille Claudel au destin tragique, qui finit à elle seule par occuper l'ensemble de la scène de l'art au féminin du XIXe siècle, véritable arbre dissimulant une forêt en fait bien touffue, souvent impénétrable.

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Certes, l'impressionnisme comporte ses icônes mises en avant avec constance (Monet, Renoir, Degas) et ses autres, plus négligés qu'avant (rien pour les centenaires des disparitions de Sisley et Pissarro en 1999 et 2003 !). Force donc est de constater que l'artillerie sortie pour honorer Berthe Morisot s'avère d'un fort petit calibre et ne fait guère de bruit... L'absence jusqu'à présent du moindre article critique du Monde au sujet de l'expo du musée Marmottan en témoigne. C'est symptomatique d'une certaine déculturation et de négligences artistiques accrues, où l'on finit par perdre toutes ses références dans l'histoire de l'art de l'Occident, y compris dans la naissance de l'art moderne, processus bien plus complexe, hésitant et buissonnant qu'on l'a dit (un peu comme l'évolution de l'homme lui-même, au fond...)... Pas grand-chose par ailleurs aussi à la télévision et dans la presse écrite (Le Figaro, la rediffusion d'un documentaire de 2009 sur Arte, un reportage à Télématin ... et c'est presque tout, même si c'est mieux que pour Dickens et les préraphaélites en 2011). Quel dommage !

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Je tiens à signaler une erreur sur le site Culturebox : Berthe Morisot fut la belle-soeur de Manet, pas sa belle-fille... C'est Julie Manet, enfant de la peintre, qui eut ce lien de parenté. Cette rectification s'imposait !

samedi 19 mai 2012

Nouvel impair nécrologique scandaleux.

"Chaque fois que les médias officiels "classiques" audiovisuels commettront un impair culturel ou ignoreront une information importante à caractère culturel  sortant des sentiers rebattus des modes imposées artificielles, j'interviendrai."

Moi : in Oeuvres complètes de Moi. Op. cit.

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Je m'en souviens comme si c'était hier... Nous étions en novembre 1985... Une autre époque, révolue à jamais... Christine Ockrent parlait à la télévision (c'était avant la dégénérescence définitive de ce médium). Elle commentait l'événement que constituait la mort du grand historien Fernand Braudel, dénonçant au passage certains journaux (sans préciser lesquels) qui n'avaient pas consacré une seule ligne à cette information.
Cela est devenu légion, vingt-sept ans après pour une telle foultitude de décès de grandes personnes dignes de survivre dans la mémoire... Dietrich Fischer-Dieskau est la dernière victime du genre. Auscultez les infos télévisées de nos chaînes pourtant attitrées et spécialisées, y compris dans la culture, et comme pour Gustav Leonardt,
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 vous constaterez qu'elles n'ont pas consacré la moindre seconde à rendre hommage à ce grand personnage, dont le tort est d'être mort trop vieux dans un monde trop décomposé et pollué par l'immédiateté ambiante pour intéresser qui que ce soit du moins par rapport à la vision que ces chaînes de télé en ont. Dietrich Fischer-Dieskau, qui a fait référence dans le Lied, dans Mahler, Wolf, Schubert et tant d'autres... n'appartenait pas au cercle des musiques à la mode, bankables, rentables, hyper piratées et téléchargées, "actuelles" et autres (quelle qu'ait été leur valeur de produit marchand éphémère et promptement oubliable par les courtes mémoires parmi les transnationales du disque).
Adieu Monsieur Fischer-Dieskau, vous qui m'enchantâtes dans les Lieder eines fahrenden Gesellen, absolu chef-d'oeuvre de Gustav Mahler. Je vous salue et je crache et débecte mon mépris à la Léon Bloy à la figure de ceux qui ont omis de vous honorer. Tout silence de cette nature n'est plus mensonge par omission, mais mépris, ignorance voire sectarisme voulant faire accroire que la Grande Culture est morte, que dis-je damnée ! Elle n'est plus qu'une marchandise noyée parmi des milliards d'autres. Cessez, messieurs, d'abandonner des pans entiers de cette Culture aux seuls réactionnaires nostalgiques d'un ordre ancien au profit de la seule chébrantude immédiate... Cessez de gommer tous nos repères... Conservez ce qui doit l'être avant que des indésirables fanatiques, iconoclastes de demain, se chargent de faire table rase de tout ce qui constitue le génie humain. A ce train-là, il ne restera rien de nous.

Post-scriptum : 

Le Monde vient de sauver l'honneur en consacrant un article excellent et justifié à ce grand disparu. Mais les dommages télévisuels demeurent irréparables...

mardi 8 mai 2012

Des romans que la critique officielle ignore.


Je suis étonné, ces derniers temps, du nombre de romans, souvent de genre, même édités par une grande maison d'édition renommée ô combien, qui ne font l'objet d'aucun article critique (même défavorable) dans la presse écrite la plus institutionnalisée. C'est triste, et c'est dommage. Même des oeuvres parues chez Gallimard n'échappent plus à cette règle étrange. Ainsi en est-il d'"Opéra anatomique" de Maja Brick, dont je m'étonne de n'avoir lu nul compte rendu depuis sa publication en février dernier. Il s'agit d'un excellent roman historique baroque, mettant en scène Pierre le Grand et l'anatomiste Frederik Ruysch, sans oublier les références musicales réjouissantes pour tous les amoureux (j'en suis) de musique italienne du début du XVIIIe siècle. Peut-être est-ce là un ouvrage trop élitiste, une fiction inaccessible, coupée de nos triviales réalités immédiates et prosaïques, qui plane trop haut pour notre temps ancré dans l'éternel présent (qui n'existe pas en physique). Après qu'on ait ignoré un des meilleurs romans historiques de la rentrée 2011 ("Le Complot de l'Ordre noir" de Philippe Pivion, paru au Cherche Midi, qui éclaire d'un jour nouveau l'assassinat à Marseille du roi Alexandre de Yougoslavie), cela devient moult inquiétant et frustrant, d'autant plus que les romans de science-fiction sont eux aussi des victimes constantes de ce boycott des critiques littéraires, plus passionnés par l'éternel nombrilisme contemporanéiste socio-cul (n'ayons plus peur des mots) germanopratin qui n'apporte absolument rien en littérature tandis que les opus troublants et magnifiques d'un Claude Louis-Combet sont passés sous silence. Conclusion sans appel, hélas ! :  Victor Hugo et Alexandre Dumas seraient de nos jours refusés par tous les éditeurs et finiraient au RSA.                 


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Ainsi, je me suis moi-même laissé piéger par cette manie de la non-critique des bouquins historiques romancés  voici deux ans. J'avais repéré une fameuse fiction picaresque de cape et d'épée XVIIe siècle dont le style d'écriture m'avait semblé éblouissant. J'ai commis la négligence d'oublier de noter la référence de ce roman...comme aucune critique n'a daigné s'en soucier, il m'a échappé sans nul doute pour toujours.
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